Galerie Contemporaine du MAMAC, Nice
Jusqu’au 2 avril 2023
Art et techniques fonctionnent aisément de concert. Il en va différemment pour les sciences quand la rigueur de la logique peut s’affronter aux errances poétiques du discours artistique. Pourtant quand il s’agit d’explorer le vivant, la science peut s’enrichir de cet autre regard que lui apporte l’artiste. En effet, dessiner, peindre ou sculpter revient à penser autrement le modèle et, peut-être, à s’affranchir du protocole scientifique ou du moins à le perturber pour lui proposer d’autres modes de pensée et de représentation. Et pour l’artiste plasticien, le défi est toujours de se confronter à l’idée de mouvement et de l’inscrire dans la fixité. Et puisqu’il s’agit ici de «régénération», un dialogue passionnant peut s’établir par lequel art et sciences peuvent se transformer mutuellement.
Pour sa seconde intervention dans la Galerie Contemporaine du MAMAC, l’artiste argentine Irene Kopelman a ainsi collaboré avec plusieurs laboratoires de recherche de la Côte d’Azur sur deux minuscules invertébrés marins, les Nematostella et le Botrylle étoilé. Des mots qui résonnent déjà comme pour des espaces mystérieux et des formes célestes pour traduire le fond des mers. Pour l’artiste comme pour le biologiste, il faut avant tout observer pour comprendre et ensuite utiliser ce savoir pour le réinsérer dans une autre réalité. Et le travail sur le vivant, c’est à dire sur les processus de transformation et de régénération, demeure pour l’artiste un défi quand il travaille sur la forme et la matière.
Irene Kopelman offre aux micro-organismes une représentation selon le modèle de l’aquarelle, de l’acrylique ou du verre quand il s’agit de sculpture. Elle excelle dans la délicatesse de ses compositions pour traduire la fragilité et le mouvement interne d’une vie aquatique et de ces organismes semblables à des fleurs mais dont 80% de l’ADN est semblable au nôtre. Représenter c’est faire passer le regard au crible d’une réflexion, instruire une enquête, livrer un constat de l’ordre personnel et sensible pour l’artiste et universel pour le scientifique. Mais l’artiste ne peut s’affranchir du social et lui apporte cette note transgressive qui peut le modifier. Irene Kopelman trace les liens intimes qui relient l’humain aux formes les plus humbles de la nature et trouble ainsi nos repères sur ce que pourrait être un art du paysage. L’artiste n’explique pas mais en ajoutant du mystère au mystère, elle ouvre peut-être des chemins inédits à la science.