samedi 17 novembre 2018

Festival OVNI, Objectif Video Nice




Autour du Festival d'art vidéo de Nice, OVNI, se greffent toute une série d'événements au 109, dans des galeries et lieux privés.
- Parcours Vidéo OVNI en ville du 16 au 25 novembre.
-OVNI à l'hôtel, 24 et 25 novembre
-Arrêt sur l'image par "le Hublot" à l'Entrepont (le 109)
-Total Contest TV le samedi 17 novembre de 19h à 23h à la Station
-Concrete Island, de Maxime Martins de 19 à 23h à la Station
-Grands canons d'Alain Biet de 19 h à 23 h à la Station
- Salon d'art vidéo et d'art contemporain CAMERA CAMERA à l'HÔTEL WINDSOR les 24 et 25 novembre

VIDEO ERGO SUM

Parfois, la nuit, de l'échancrure d'une fenêtre, l'on perçoit des lueurs vacillantes et bleutées qui tissent, dans la pénombre d'une pièce, un rythme syncopé, insignifiant, quand tout semble se résumer dans l'électrisation d'un espace. On sait pourtant que là, quelque chose se joue, qu'un récit se trame entre l' écran invisible et sa rencontre avec celui qui s'y confronte. Et cet autre qui, par effraction, perçoit la scène assourdie dans ce clair obscur qui le précipite de l'extérieur vers l'intimité d'un l'intérieur, celui-là vit l'expérience de l'imaginaire.

Telle serait peut-être la métaphore de la vidéo ou, du moins, l'une de ses figurations possibles. En retrait de toute définition et même, agissant contre elle parce qu'elle est mouvement et durée informe. Et l'on devine dans son processus quelque chose de brouillé, d'hybride, hors de toute linéarité et, que l'on y introduise du récit, on n'en espèrera alors ni début ni fin. Au moins ne subsistera-t-il que ce filament lumineux comme seul fil d'Ariane pour quelque chose qui s'écrirait, aléatoire, dans un espace invisible  : un bloc énergétique.

Bien sûr, on se dit que «  ce n'est que  » de la télévision. Mais, à la réflexion, on sait que ce pourrait être aussi bien un écran d'ordinateur, un jeu vidéo ou autre chose encore. Une sorte d'Ovni. Quelque chose d'autre, dont l'identité m'est étrangère, dont je ne perçois pas l'image mais une pluie de déchets lumineux par lesquels je saisis pourtant l'altérité d’une essence à sa source. Alors il me revient de combler ce champ nocturne, vaguement étoilé par tous ces éléments épars faits d'attentes et de rêves par ce qui deviendrait un récit  ; de le faire osciller de l'écran au spectateur, et à l'inverse, de me demander qui, de l'un ou de l'autre, en est l'acteur.

La vidéo force le spectateur. Et le contorsionne dans son attitude de soumission au regard et à l'image. Elle n'est jamais hypnotique. Même s'il éprouve de l'ennui ou qu’il se trouve exclu du récit qu'il espérait, le spectateur expérimente un autre temps, une autre déformation du réel. Et la vidéo est tellement multiple qu'elle le saisira là où il ne l'attend pas. Parfois informative, militante, répétitive. Parfois décalée, drôle, éruptive ou bien lancinante, interminable à moins qu'elle ne soit syncopée, folle, explosive. Avec elle, tout est possible; elle peut jaillir hors de l'écran, se mesurer à des objets réels comme elle peut aussi bien se dissoudre dans le blanc d'un signal éteint. Expressive ou minimale, elle est ce qui n'a pas de nom parce qu'elle demeure cette entorse au temps, à l'identité de l'art qu'elle semble parfois lorgner avec suffisance dans son rétroviseur. Elle est une fuite technologique, si peu humaine qu'elle nous saisit au col pour nous rappeler à quoi nous serions réduits pour elle  : des fantômes tâtonnant dans le réel.

Mais c'est là encore une illusion. Nous n'étions ici que les ombres d'un monde que nous refusions de voir et que les flux numériques ou filmiques découpent d'une lumière crue, sans concession aucune, pour nous rappeler les pulsations vitales, l'énergie concentrée dans cette machine que nous avions enfantée. Traitement laser pour extirper l'ancienne beauté du monde à moins qu'il ne se réduise à l'autopsie d'une vieille fée électrique, épuisée  : La vidéo est toujours devant; fuyante, elle échappe aux mots et aux formes. Elle s'émancipe ainsi de l'art dont elle se nourrit mais elle s'empare de lui et le regénère. Elle circule à la vitesse de la technologie, rêve à la vitesse de la lumière et se refuse à mourir à la manière d'une étoile. Trop vivante pour s'en soucier, elle vibre de cette énergie qui la maintient hors de toute téléologie, au-delà de toute forme , quand son contenu exhale la transformation, le mouvement, quitte à être plate, baroque, fausse, laide ou belle. Qu'importe, elle est un flux pour des vagues de lumière emportées dans des paquets de nuit.

On allume l'écran. L'image apparaît. Des parasites. Ou bien est-ce l'image qui désormais se désigne comme parasite  ? La vidéo raconte cette histoire sans récit.. On sait qu'elle sera semblable à toute vie dont on est condamné à ignorer le commencement et la fin. On sait qu'elle est vitesse, lenteur, accélération. Que des fragments de mémoire l'habitent. La vidéo est un étrange organe dévitalisé qui, pourtant, fouille les corps, enregistre les pulsations, sonderait les âmes si elle le pouvait et, au bout du compte, se glorifie d'être ce qu'elle est : du mouvement à l’état pur sculpté par la lumière.

Michel Gathier


jeudi 15 novembre 2018

Entre/Deux: "La mémoire et la mer"


                          
Philippe Ramette


                           On use parfois d'expressions poétiques si lisses qu'elles ressemblent à des galets usés. On hésite devant la mièvrerie dont elles sont pourvues mais invariablement , l'on y revient, comme pour caresser de vieux poncifs, des banalités heureuses auxquels l'on se raccroche malgré tout tant elles résonnent dans nos souvenirs. Il faut penser de la sorte mais aussi sous les auspices de l'humour et d'une flânerie étonnée, pour éprouver ce titre « La mémoire et la mer » qu'"Entre/Deux", Rébecca François et Lélia Decourt, proposent pour leur exposition d’œuvres consacrées à la mer.

                               La mémoire est le lieu de ce qui perdure sur les ruines de l'effacement. La mer est cet espace mouvant, « toujours recommencé » pour reprendre le vers de Paul Valéry, cet élément incertain où le destin des vagues restera d'échouer sur les rivages. Métaphore chargée pour l'un comme l'autre de ces termes qui jouent des mêmes entrelacs dans nos imaginaires. Aussi mettre en image cette proposition c'est prendre le risque de la vider de sa force poétique pour la contenir dans la seule séduisante surface de l'illustration. Mais là encore, il faut de nouveau rechercher une origine, une étymologie de cette « illustration »: C'est le lustre, la lumière. Ce flux de lumière qui demeure l'essence et la constance de l'espace maritime.

                             L'exposition rassemble ces résidus de lumière, ces hésitations entre permanence et mouvement continu. Elle s'érige ainsi comme lieu d'un déséquilibre qui met aussi en jeu nos principes de perception et notre stabilité corporelle. Il ne s'agit donc plus ici de représenter mais de se mesurer à cet univers-là qui nous attire autant qu'il nous effraie. La mer contient ses sirènes comme la mémoire revient avec ses démons et ses regrets heurter les rives de notre présent. Des dessins, des photographies, vidéos et autres compositions témoignent d'un puzzle impossible à recomposer. Comme la mer, la mémoire, la poésie...

Œuvres de Benoît Barbagli, Caroline Duchatelet, Marco Godinho, Julien Griffaud, Alice Guittard, Philippe Ramette, Omar Rodriguez Sanmartin.

Caisse d'Epargne Masséna, Nice, du 10 novembre au 11 janvier 2019


dimanche 11 novembre 2018

Gladys Nistor, "Floating geometric shapes"




Et la lumière fut. Ou bien, "Au début était le verbe". A moins que l'art ne suscitât déjà ce flux incontrôlable de la création et qu'il se chargeât de ce désir pulsionnel d'une forme, d'une architecture. Et pour la couleur, on ne s'en tiendra donc qu'à ce faisceau minimal du noir et du blanc, comme si, à cet instant de gestation, seule la tension primordiale de l'obscurité et de l'aveuglante lumière blanche eût suffi à tisser les lignes de force d'un acte démiurgique.

D'origine argentine, Gladys Nistor est une artiste hantée par l'idée de création. Ou plutôt par l'hypothèse qu'elle suppose. En effet l’œuvre qui s'instaure dans un espace bien particulier - les murs et les angles d'un appartement ou seulement une boite ou un socle - ne vise pas tant à produire une architecture qu' à nourrir de sens ce filament originel qui donna lieu à une réalité sensible. L'artiste s'attache alors à dénouer des lignes de forces, à proposer d'autres perspectives comme autant de possibles ou de mirages.
Le point de départ  confond alors un point noir ultime  à sa source lumineuse. Le réel se cherche à l'intersection de cette rencontre que seul l'art peut rendre visible. L'alpha et l’oméga se fondent ainsi dans un alphabet pour traduire l'origine du monde et la restituer dans sa fondamentale obscure incandescence. Oxymore des mots pour dire l'indicible union du vide et du plein, de l'opacité absolue et de l'infinité de la lumière dans cet instant à l'aube des choses comme une prophétie de la nuit.
A découvrir cette œuvre, c'est peut-être l'abstraction pure qui se découvre. Par  son évidence originelle, par sa géométrie brutale, aveuglante, mais parfois déjà minée par les éclats de poussière, les prémisses de sa disparition. C'est en cela que l’œuvre de Gladys Nistor est si intense qu'elle parvient à formuler ce que les choses déjà élaborées ne savent  plus exprimer.
L'artiste fait jaillir ce balbutiement de la vie et lui donne chair entre forme et chaos. L'espace se transforme; il nous appartient désormais de nous y aventurer. L'hypothèse tient ses angles, elle s'arrime à ce que nous ne voulons pas ou à ce que ne nous ne savons pas voir. Parfois le miracle se produit, les yeux se dessillent.

Moving Art, 24 Rue Paul Déroulède, Nice, Sur rendez-vous  06 88 09 93 62
Du 10 novembre au 14 décembre 2018

Expositions personnelles

2017 : « Weightless Matter » Galerie Puerta Roja, Hong-Kong
2017 : « En Noir et Blanc : objets de lumière » Galerie Edifice, Paris
2007 : « Paysages de Salon », Centre Design, Marseille
1995 : Instituto de Cooperación Iberoamericana, Buenos Aires, Argentine
1992 : « Architecture Du Naturel » Galerie Olga Soe, Paris, France
1991 : Galerie Bernanos, Paris, France

Expositions collectives
2018 : « Ombre et Lumière » Galerie Moving Art, Nice
2017 : « Art Paris Hors les Murs » Galerie Wagner avec Greff International Immobilier
2017 : « De l’original au multiple » Galerie Wagner, Touquet Paris-Plage
2016 : « Affinités Abstraites » Galerie Wagner, Touquet Paris-Plage
2016 : « Possibilités du noir » Julio-Artist Run Space, Paris
2016 : « Hommage au Carré » Galerie Wagner, Touquet Paris-Plage
2000-2002 : « Painting Zero Degree », Independent Curators International, exposition itinérante (commissaire : Carlos Basualdo), Cranbrook Museum of Art - Bloomfield Hills, Fred Jones Jr. Art Museum - University of Oklahoma, Cleveland Center for Contemporary Art - Cleveland, Etats-Unis
1997 : « Sueños concretos », Nuevos Nombres internacionales (commisaire : Carlos Basualdo), Biblioteca Luis Ángel Arango, Bogotá, Colombie
1996 : Invitée, Salon d’Art Contemporain, Montrouge, France