lundi 16 novembre 2020

Slavs and Tatars, « Régions d'être »

 



Villa Arson, Nice

Jusqu'au 31 janvier 2021


Pour les voitures comme pour l'art, l’hybride est à la mode. Marcher à la fois sur un bras et sur une jambe, penser avec un hémisphère gauche et un pied seront, n'en doutons pas, l'objet de recherches et de doctes conférences. Pour faire de l'art, mixons de l'humour, de la science, de l'histoire, de la géographie, de la religion, du politique et de la linguistique. On laisse aussi fermenter des cornichons et le parcours initiatique s'ouvre alors sur un drolatique mur de corps-nichons. Et puis, peut-être des sculptures, des images, des plans, des notes, des mots, des assemblages pour un grand bazar que nous propose le collectif berlinois Slavs and Tatars.

Mais l'hybridation étant de mise, l'aspect visuel voire auditif de l'ensemble requiert par ailleurs livres et conférences qui nous éclaireront sur ce grand écart entre le mur de Berlin et la muraille de Chine, là où les anecdotes et la petite histoire se confrontent à la pérennité des mythes et des constructions culturelles. Muni d'un mode d'emploi et de sa boite à outils conceptuels, le visiteur s'amusera de son soudain génie à découvrir que la terre n'est pas plate, que le temps n'est pas simple et que l'art l'est encore moins. Avouons qu'on ne s'ennuie jamais, chaque pièce réservant sa propre pirouette formelle dans une installation labyrinthique où l’intelligence et le gag jouent d'un parfait désaccord. Slavs and Tatars nous invite « à regarder ailleurs, au-delà des frontières, des idéologies et des croyances. » Et il est vrai que dans ce parcours déroutant, tout se fissure et que l’œil est ballotté d'une œuvre à l'autre comme une boule de flipper se cognant à des points lumineux. On s'amuse, on s'étonne. Et l'on a envie de rejouer la partie !