Galerie le 22, Nice
La
clé des songes n'ouvre les portes d'aucun paradis. Ou même
d'ailleurs de l’incandescence d'un enfer. Seulement peut-être celles
d'un territoire interstitiel labouré par une mémoire, des rites et
des mythologies ; là où ne s'échouent que les objets qui les
signent, épaves du temps, figures de l'angoisse. Tel serait ce récit
d'Alexandra Guillot dans ses « Contes de l'homme meublé »
où un simulacre d'autobiographie se heurte à l'universalité du
mythe condensé dans le travail du rêve. Freud écrivait :
« Les
mots dans le rêve sont traités comme des choses, ils sont sujets
aux mêmes compositions que les représentations d’objets ».
La
relation au surréalisme s'impose. On y retrouvera l'humour noir,
l'écho du fétichisme dans l'objet qui se fixe comme signe
régulateur d'une syntaxe onirique. Et surtout par la connotation de
ces objets agissant comme autant de traces d'un lexique qui s'énonce
dans le kitch. Plus qu'un style, il témoigne ici, dérisoirement,
d'un trop plein, d'un débordement de sens que seul le rêve pourrait
expurger et que l'artiste exhibe comme une collection de reliques
sombres et inquiétantes . Mobiliers et bibelots sont tapis dans la
brume d'une obscurité douce. Un espace intercalaire s'ouvre entre
sommeil et rêve éveillé. Les objets inanimés retrouvent leur âme
dans l'antichambre de la mort alors que ce faux « théâtre de
la cruauté » ne serait que l'étalage d'une drôlerie.
Car
l'humour établit une distance et contrecarre toute immersion
sensorielle. Le théâtre se réduit ainsi à une série de clichés
à partir de vaisseaux fantômes, de cierges et de tout un appareillage
relatif aux rites funéraires. Si certains y voient une méditation
sur les seuils, le rêve et la réalité, la vie et la mort,
peut-être préférerons-nous y percevoir la grimace rieuse de nos
angoisses. Les films d'horreur ne sont-ils pas faits pour les grands
enfants ?
Michel Gathier
Michel Gathier
Exposition du 14 octobre au 25 novembre 2017