Galerie Sabine Puget, Château Barras, Fox-Amphoux, Var
Très différentes dans leur projet, les peintures de Demozay et de
Schneider traitent de la question de l'espace. Pour le premier il
s'agit d'un espace purement pictural lié à la couleur, à sa
qualité interne et à la manière dont elle agit en relation avec
une autre. Elle se mesure, vigoureusement ou avec hésitation, dans l'ébauche d'un rectangle imparfait mais se refuse à dire autre chose
qu'elle-même et de cet espace qu'elle suggère.
Pour Jean-Pierre Schneider, les larges aplats de peinture prennent leur source dans une extériorité qui est celle des mots. Mais ceux-ci
semblent saisis dans la gangue de la matière picturale et le peintre
les révèle par incision, griffure, jusqu'à ce qu'ils émergent,
balafrés et nus, dans ce signifiant muet d'un langage sur le point de
naître.
D'où le trouble que cette peinture produit. L'espace joue
d'une totale sérénité, la lumière diffuse une couleur majestueuse
qui se module entre le mat et le brillant, et de larges surfaces lisses
ou recouvertes de couches successives. Et soudain des explosions de
matière, des balbutiements de signes perturbent cette ordonnance
classique dans la pureté de la forme d'une colonne, d'un chapiteau
ou d'une voûte.
Ces citations architecturales relèvent alors d'une forme d'archéologie comme si la peinture était un écho, un révélateur qui énonçait un acte fondateur, avant les mots et les choses. Et que cette énonciation était surtout une annonciation quand elle parlait d'une naissance et d'un mystère, qu'elle était ce dépôt sémantique saisi dans une histoire originelle de matière en gestation pour l'aléatoire des formes et des couleurs dont l'artiste s'empare à l'intersection du hasard et de la nécessité. Et toujours, au-delà de la matière et du langage, l'horizon de la poésie, ce filament brûlant qui étincelle ici.
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