vendredi 6 octobre 2017

Philippe Ramette, Exposition monographique

Espace à Vendre, Nice




L'art de Philippe Ramette se fond dans un récit dont l'homme serait à la fois l'initiateur et l'acteur. Un récit d 'apparence autobiographique s'il fallait ici s'abandonner aux faux semblants alors que l'artiste, au contraire, en désigne les trucages et révèle l'envers d'une mise en scène dont le décor serait le monde physique avec ses objets, des villes ou des océans.
 L'homme de Ramette est universel en ce sens qu'il est soumis aux lois de la gravité, à l'illusion de la perspective, à l'attraction de la pesanteur mais le geste de l'artiste -ce qu'il convient désormais de nommer « performance » - sera celui d'une expérience de la déconstruction de ces lois. Changements d'échelle, architecture du déséquilibre, autant de manières pour Philippe Ramette d'introduire des coupes dans notre façon d'envisager notre rapport au monde.

Les photographies illustrent cette impossible ou douloureuse relation de l'homme à son environnement. La posture raide et figée du personnage dans son précaire équilibre exclut toute psychologie et désigne de fait  un récit sans narration. Ce qui serait le moindre paradoxe pour une œuvre construite sur la notion même de paradoxe et  de  défi au sens comme à la  logique. Mais ici  tout est faussé et l'artiste démont(r)e les illusions, les procédures vaines et lui-même se donne à voir comme un signe corseté dans le costume sombre et stricte de l'anonymat. Egalement dans les dessins ou les sculptures en résine, l'homme se réduit à une enveloppe vide, à un spectre.

Il y a ici cette forme d'humour métaphysique qu'on peut retrouver dans les mises en scène de Magritte, dans la récurrence d' hommes réduits à des signes anonymes, étrangers au monde, dans les peintures de Jean Hélion ou d' Antonio Segui. Pourtant Philippe Ramette – autre paradoxe – reste l'artiste de la gravité même quand il en déconstruit fictivement les lois. Tout est factice, tout est réversible.
Cet humour froid, distancié, clinique, joue avec l'humour noir en le désignant comme simple référence sans jamais nous installer dans un univers sombre ou hostile. L'objectivité -peut-être faudrait-il dire, « l’objectivation du monde » - reste de rigueur. Sur un socle de bois pur, une porte s'ouvre sur le vide avec une plaque  « sortie des artistes » et l'on pense à un échafaud. Ailleurs des objets se réduisent à des prothèses et l'on ne sait qui de l'homme ou de la chose est le plus risible en cette inquiétante  histoire. Prothèses, synthèses, foutaises, tout est grinçant et nous donne à voir autrement le monde.
Pour cela, il lui faut s'en détacher, l'expérimenter par des rites quasi obsessionnels et maniaques, en représenter l'aridité radicale pour en extraire, au mieux, une beauté nouvelle. A moins que le trouble, la suspension du sens littéralement figurée ici en soit le creuset pour la promesse d'une autre perception du monde.

Du 6 octobre au 26 novembre 2017




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