dimanche 22 septembre 2019

Fondation Bullukian, Lyon


Jérémy Gobé « Anthopocène » et Andrea Mastrovito « Le monde est une invention sans futur »

Jusqu'au 5 janvier 2017

Parodiant la phrase du précurseur du cinématographe, Louis Lumière, « Le cinéma est une invention sans futur », l’artiste italien Andrea Mastrovito nous propose une relecture du monde par le biais d'un décalage assumé qui nous force à l'observer selon des médiums et des normes contraires à leur fonction d'origine. C'est ainsi que sur un sol de 110 m2 l'artiste dispose un ensemble réalisé en marqueterie pour un patchwork de représentations de plans mythiques du cinéma. Or ceux-ci reflètent ce qu'est notre monde – images, ruines, espace désarticulé et temps insurrectionnel. Mais l'artiste, à l'aise dans tous les registres, s'amuse à contrebalancer cette œuvre sombre par une débauche de couleurs et de formes pour un regard d'apparence naïve sur l'explosion de la vie végétale et animale.
Mais cette nature saisie à l'extrême jusqu'à se transformer en mythe est un moyen pour Mastrovito de nous alerter sur les menaces qui pèsent sur elle. Cette nature fantasmée, idéale, qu'il nous montre n'est que le fruit d'une accumulation de découpages de livres et donc d'une transformation de la nature ou de documents plastifiés. L'horizon post-humaniste serait-il donc post-naturel, n'en resterait-il que l’illustration idéalisée d'un univers déchu ? Et la splendeur d'un paysage ne serait-il que la composition à post priori d'une extinction programmée ? Il y a dans cette œuvre l’écho triste d'un paradis perdu mais aussi le souffle salvateur d'un autre cheminement, d'un monde à refaire. Et c'est sans doute ce qui est en jeu lors de cette Biennale de Lyon. Dans la Fondation Bullukian, le travail de Mastrovito est présenté en parallèle avec celui de Jérémy Godé, dans le jardin, si différent dans la forme, mais qui résonne avec elle comme une coda tant elle s'implique sur un même engagement mais par le biais de la science et de l'industrie. Le commissariat de Fany Robin aboutit à une exposition cohérente qui ouvre à la réflexion.


On peut alors s'interroger, pour le reste de la Biennale, sur ce commissariat collectif issu d'un même sérail du Palais Tokyo qui, en dépit d’œuvres parfois saisissantes, a choisi des travaux issus d'un consensus mou. Souvent elles semblent se parasiter, jouer du gigantesque pour palier à un sens incertain si bien que le meilleur côtoie le pire du recyclable et du déjà vu. Cette Biennale, si elle reste passionnante, donne surtout l'envie de suivre certains artistes qui, dans un cadre plus modeste, diffuseraient une réflexion sensible et personnelle sur les enjeux du monde d’aujourd’hui.






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