lundi 6 mai 2019

Liselott Johnsson, "MAYDAY, MAYDAY, MAYDAY"



MAYDAY, MAYDAY, MAYDAY, un signal de détresse auquel on ne pourra peut-être répondre que par le secours de l'art et de la poésie.
 « Je dirai quelque jour vos naissances latentes » écrivait Rimbaud dans « Voyelles » pour associer chacune d'elles à l'une des fulgurances de la vie. Le poète énonçait alors tout à la fois les prémisses d'un dévoilement et de l'élaboration d'un langage. Dans cette même perspective énigmatique d'une relation entre un signe et un « événement », Liselott Johnsson, dans son installation « Mayday, Mayday, Mayday », reprend cette interaction de la couleur et de la forme pour la replacer dans le contexte de l'histoire de la peinture abstraite. Non celle du corps et de ses pulsions mais dans celle de la pensée, d'une réflexion sur la création et la validité d'un code linguistique.
Pourtant cette œuvre ne se prétend aucunement théorique, elle ambitionne plutôt  à raviver chez le spectateur la réflexion sur ce rapport entre la couleur et un système géométrique. Ainsi l'artiste crée-t-elle un vocabulaire où chaque lettre est associée à un carré habité d'un signe coloré qui, culturellement, fait allusion à des systèmes bien définis -signalisation dans les transports, par exemple dans le Code international des signaux maritimes, mais aussi dans d'autres domaines tels que le High Capacity Color Barcode développé par Microsoft. Si l’œuvre de Liselott Johnsson nous incite à penser ces systèmes visuels qui agissent sur nous sans que même nous ayons à les analyser, elle en souligne les aspects décoratifs et architecturaux. La couleur et le signe portent en eux la construction d'un sens et incite le spectateur à une réaction individuelle et sociale. Dans l'élaboration d'un langage plastique arbitraire et d'un code visuel pour désigner un mot, l'artiste nous éclaire sur l’ambiguïté fondamentale de ce ce que nous tenons comme acquis naturellement quand tout ne procède que d'une construction culturelle.
L'artiste nous renvoie aux signes premiers, aux langages primitifs et à ceux que nous connaissons mais sans les comprendre et les interpréter. Comment percevoir alors le réel, comment obéir à ses injonctions ou comment le transformer ? Quel est sur lui le pouvoir de l'artiste et quelles sont les limites de la création ? Voici donc une œuvre réfléchie qui se livre en toute clarté, dans l'exigence d'une ouverture à la poésie par la seule sérénité de la forme et de la couleur. L'ombre lumineuse de Rimbaud, la puissance de sa synesthésie règnent ici. Nous nous immergeons avec ravissement dans ce langage inconnu.

Moving Art Gallery, Nice, jusqu'au 29 juin 2019


Artiste suédoise et américaine, Liselott Johnsson, est née à Uddevalla en Suède en 1967. Elle vit et travaille à Nice depuis 2016. Elle a suivi une formation en architecture et en art dans des écoles renommées en Europe et aux Etats-Unis. Elle possède un Master of Fine Arts in Visual Arts, ainsi qu’un Master en Architecture. Ses œuvres ont été présentées dans de nombreuses galeries d’art, musées, et espaces publics aux Etats-Unis et en France comme au Museum of Contemporary Art of Georgia, Atlanta, USA; Muhlenberg Public Library NYPL, New York, USA; Brooklyn Fire Proof/Temporary Storage Gallery, Brooklyn, NY, USA ; Glass Cube @ Hotel Indigo, Athens, Georgia, USA; Gertrude Herbert Institute of Art, Augusta, Georgia, USA; Boston Public Library, Boston, Massachussetts, USA ; Steffen Thomas Museum of Art, Madison, Georgia, USA; Monastère de Saorge, Alpes-Maritimes, France.

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