Villa Kérylos, Beaulieu sur mer
Jusqu'au 26 septembre 2021
Entre l'abrupt d'une falaise et l'horizontalité de la mer se dresse la Villa Kérylos tel un défi à l'espace et au temps, et sans doute à la raison quand l'archéologue Théodore Reinach la fit bâtir au début du XXe siècle dans l'idéalisation d'une Folie de la Grèce antique. Cette construction toute en décrochages et en angles, tel un promontoire sur la Méditerranée, est un songe immobile auquel le scénariste et designer Hubert Le Gall redonne souffle aujourd'hui par la magie d'une trentaine d’œuvres toutes en courbes - sculptures et objets de mobilier créés sur mesure - dans le fantasme d'un voyage hors du temps, quand les éléments se heurtent aux Dieux et aux Hommes.
Par un détournement subtil de leur usage, les objets qu'il crée sont autant d'invitations au rêve et nous entraînent dans leur sillage à des jeux d'illusions, à des envolées poétiques pour une Odyssée tour à tour sombre et joyeuse. Une sculpture de bronze patiné, « Le cratère du temps » accueille le visiteur. Plus loin, une installation de laiton et de plumes « Le murmure des âmes » nous fait vagabonder dans un parcours onirique, d'une salle à l'autre, dans la majesté d'un péristyle, les parfums d'un jardin saisi dans les embruns de la mer. Tout est en sinuosité et les formes végétales empruntées à l'art nouveau s'enroulent comme des vagues pour dire cette permanence de la Méditerranée qui nous raconte les voyages, les mythes et les guerres mais aussi l'art quand, dans les créations d'Hubert Le Gall, on retrouve l'univers surréaliste de Dali, son humour discret ou bien la force tellurique du signe propre à Miro.
La Villa Kérylos est alors une fête pour l'esprit, un ravissement pour l’œil qui s'amuse de ces jeux de matières quand le fer forgé s’affronte au cuir, au verre ou à la tapisserie. Le baroque et la préciosité se jouent ici de toute convention. L'art est un monstre qui dévore les lieux avec gourmandise et Hubert le Gall déploie les formes du plaisir dans un bestiaire poétique qui électrise l'espace. Pasiphaé, Zéphir et Chloris et toutes les ombres lumineuses du passé et de la mythologie s'emparent bientôt de nous pour un merveilleux voyage.
A la mort de Théodore Reinach en 1928, la Villa Kérylos fut léguée à l'Institut de France et est désormais gérée par le Centre des Monuments Nationaux.
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