Espace à Vendre, Nice
Jusqu'au 31 juillet 2021
Par la reprise du mot allemand qui signifie « thésaurisation », Jean-Baptiste Ganne reprend le terme exact qu'utilisa Karl Marx dans le Capital. C'est ici une manière de relier le mot au visible et l’œuvre à la notion de valeur. L'artiste s'attache à « la représentation de la politique et à la politique de la représentation », c'est à dire à une critique de l'image quand celle-ci est asservie au système de production fondé sur l'usure. Image et langage s'articulent aussi dans une dialectique que Jean-Baptiste Ganne met en scène selon deux vastes compositions. L'une « Windhandel », ou « Le commerce du vent » est constituée d'une série de dessins au graphite dans un format A5 qui renvoient à l'euphorie monétaire et à la bulle financière du commerce des bulbes de tulipes au XVIIe siècle en Hollande. L'écroulement du marché qui s'en suivit fut considéré comme un moment fondateur de la logique capitaliste dont l'artiste décompose le processus de façon plastique en créant une collision entre l'ancien - l'apparence d'une gravure d'époque et la typographie des mots qui l'accompagnent – et le nouveau : le travail à partir du numérique, la distorsion d'une même échelle entre la tulipe et la représentation de scènes d'émeutes contemporaines en lien avec la contestation du capitalisme.
La deuxième série est constituée de 48 photographies réalisées entre 1998 et 2003 sous un titre ironique, « Le Capital illustré ». Chacune d'elle est la séquence relatant par effet d'éloignement une conséquence de l'histoire et cristallise un moment de pensée. Un titre, par exemple, « Le caractère fétiche de la marchandise et son secret » est une séquence langagière à l'égal de l'image qui lui donne forme. Le spectacle est tautologique, écrivait Guy Debord dont la critique irrigue cette œuvre. Il écrivait encore encore : « Le spectacle n'est pas un ensemble d'images, mais un rapport social entre des personnes, médiatisé par des images », ou bien « Le spectacle soumet les hommes vivants dans la mesure où l'économie les a totalement soumis ». Dans un art de la parodie et des glissements sémantiques, Jean-Baptiste Ganne joue du sens et déjoue l'image quand la galerie d'exposition s’appelle justement «L'espace à vendre »
.Dans le même temps, la galerie présente des sérigraphies de l'atelier Tchikebe parmi lesquelles des œuvres de Villeglé, Peinado, Tania Mouraud et le travail prometteur d'une jeune artiste, Eglé Vismante.
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