samedi 16 février 2019

Villa Arson, Flora Moscovici et Linda Sanchez + tainted love/club edit




Liberté et plaisir s’inscrivent en matière et lumière pour une exposition de laquelle une vie torrentielle jaillit, sans tabou, sans autre limite que la scénographie qui l'encadre. « Tainted love/ Club edit » est ce récit sombre et lumineux d'une histoire qui culmina à la fin du siècle dernier et Yann Chevalier, en partenariat avec le Confort Moderne de Poitiers, en compagnie de 35 artistes restitue cette dramaturgie dans une débauche d'images et d'objets comme rappel de la Culture Club qui enflamma les nuits. Bien sûr le corps, dans ses multiples facettes, par son exubérance, irrigue l'espace et ce temps comme un nerf à vif, une excroissance d'énergie qui en met en péril les limites. En arrière plan, une musique qu'on n'entendra pas mais que la scénographie suffira à en rendre l'écho joyeux et acide. Une orchestration qui ici se transforme en kaléidoscope, dans des découpes de corps tamisés comme autant de synecdoques pour nommer l'essence et la forme du désir, du sexe et la nuit de la mort.
A l'origine de l'exposition, un tube de Soft Cell et ses paroles de rupture. Car c'est bien dans une faille que tout ceci se construit. Béance au cœur de la nuit, éclairs sur la piste où Dieu ou le diable mènent la danse. Miroir à facettes, chaussures de luxe, accoutrements improbables, sexe et sueur, tous les matériaux, tous les dispositifs sont convoqués. Le visiteur est accueilli par un somptueux néon de Sylvie Fleury dont on découvrira par la suite des paires de chaussures en bronze posées sur miroir. Puis les sous-vêtements Calvin Klein et Levi's d' Elmgreen§Dragset., le sexe velouté et torride de Betty Tompkins. Dream and Fachion. Là où le réel s'épuise dans le petit matin blême, l'art prend le relais dans son extrême diversité. On s'amuse de la démesure, on s'émeut de la nuit et de ses fantômes qui s'agitent dans l'or et la lumière. Le narcissisme se noie dans les communautés de circonstance, la culture gay caresse l'imaginaire des people, chacun devient le VIP de ses rêves.
Une vaste salle est consacrée à l'exubérance colorée de Norber Bisky qui déploie ses fantasmes solaires ou nocturnes. La peinture explose comme pour illuminer ce qu'elle aveugle. Les corps sont beaux, les fonds sont idylliques, le bonheur est peut-être un poison.
En contrepoint, en marge de l'exposition, dix peintures de Fabienne Audéoud, par des agrandissements d'illustrations enfantines, nous placent dans une autre perspective, celle des contes et des petites souris humaines. Celles-ci nous murmurent ironiquement que sans doute jamais nous n'atteindrons nos rêves d'enfant.
La seconde exposition, « dérobé » dans la galerie carrée, résulte d'une résidence de Flora Moscovici et de Linda Sanchez. L'architecture du lieu est en prise avec deux artistes aux pratiques fort différentes. Les murs sont négligés au profil du plafond alvéolé et de l'espace central. La lumière naturelle baigne au cœur de ce dispositif. La rencontre des deux artistes se réalise avec humilié comme un hommage au lieu . Peintre, Flora Moscovici s'empare du plafond sur lequel elle répand un subtil jeu coloré sur sept caissons. Le béton et leur stricte géométrie s'anime alors d'une aura poétique tandis que Linda Sanchez travaille la sculpture hors des cadres traditionnels. Elle déploie, du plafond vers le sol, une vaste courbe à partir d'une bâche enduite d'argile crue. Son séchage crée des zones lumineuses qui changent au fil du temps et dont le sol recueille les dépôts de cet arc. Légèreté et tension s’organisent à partir de câbles qui soutiennent l'ensemble par des masses d'argile. Ici encore, la Villa Arson rend hommage à la lumière.


Villa Arson, Nice, jusqu'au 26 mai 2019


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