Galerie Sveta, Nice
Si le panthéon
est le lieu de tous les Dieux encore lui fallait-il accueillir celui
à qui revient la prérogative de créer les œuvres de la démesure,
de l'ironie, du doute, de l'humour, de l'affirmation tenace et de
tout le bricolage mental et physique pour ce qu'il convient d'appeler
un artiste. Autant dire que l'aventure d'une « cité
reconnaissante aux artistes » se révélera périlleuse pour
celui qui s'en empare, à moins que Gilbert Pedinielli lui-même ne parle au
nom de cette « cité » qu'il convoque. Ce qui ne serait
d'ailleurs guère péremptoire pour cet artiste qui ne cesse de
perturber les lignes entre l'humour et une réflexion grave sur les
images et l’œuvre d'art.
De ce grand
écart Gilbert Pedinielli jubile mais avec gravité. Il décline
une série de toiles qui toutes répondent à une même" logique", à
une codification de chiffres et de signes, à des pans de toiles qui
flottent, se superposent et se complètent en laissant entrevoir ce
qui se cache et , en même temps se dévoile. Voici donc un jeu qui s'élabore tel un jeu
de pistes qui explorerait les relations logiques, artistiques,
idéologiques entre, par exemple, Botticelli, Klee ou Duchamp et Rosa
Luxembourg ou Maïakovski. Ce qui nous est restitué dans cette série
ce sont les lignes et les courbes régulières de dessins à même la
toile comme écho au nombre d'or et à la Renaissance. Ce sont
aussi des bandeaux de couleur bleu blanc rouge ironiques et froids
qui se modulent parfois à des des simulations de plissements de
banières. Toujours des allusions, des lignes de fuite, des chausse
trappe qui nous éclairent tout en nous égarant.
Comme
toujours chez Pedinielli il faudrait en revenir à une forme de
« loi des séries », dans cette obstination à disséquer
un ensemble avec sa part de hasard et de rationalité pour en
extraire des figures signifiantes. Ainsi travailla-t-il de manière
quasi obsessionnelle la figure de Marilyn Monroe comme, par
ailleurs, il déclina les visages des « folles de Mai ».
Série de figures emblématiques qui surgissent de l'anonymat ou qui
sont ancrées dans le prestige d'un nom propre. Car l'humour permet
cette distance qui n'est en rien dérisoire : l'acharnement, la
revendication ne sont jamais absents de cette réflexion sur l'art
qui se confond à l'histoire et à la politique. Il s'agit donc bien
là d'une radiographie de l'oeuvre d'art à travers le temps et de sa
confrontation avec les hommes qui l'ont suscitée et ceux qui l'ont
reçue. Gibert Pedinielli s'inscrit dans cet interstice, là où il
n'y a plus de cadre, mais flottement, hésitation, codage et
décodage. Là où la figure se défait quand dans l'amorce d'une idée, une histoire se construit.
A chacun donc de se saisir de ce récit, d'en retrouver la grammaire. A chacun de se retrouver explorateur et artiste.
M.G
M.G