Jusqu'au
5 janvier 2020
Lafayette
anticipations, Paris
Elle a fait partie des nommés
pour le prix Marcel Duchamp 2019 et ses travaux s'articulent avec un
lieu spécifique dont elle sonde les propriétés à partir de
sculptures, installations et performances. Katinka Bock met
donc en relation deux architectures, celle de la Fondation
d'entreprise Lafayette - un ancien bâtiment industriel du XIXe
siècle rénové par Rem Koolhass - et celle du Anzeiger Hochhaus,
siège du journal éponyme, achevé à Francfort en 1928 et qui fut
l'un des plus hauts bâtiments d' Europe. C'est là qu'en 1947
sortira Der Spiegel qui ambitionna de redonner à l'Allemagne les
conditions d'un débat démocratique.
Donc une architecture et une
histoire spécifique servent de passerelle à Katinka Bock pour
explorer les relations entre un espace, son rapport au temps et à sa
fonction sociale. L’œuvre qui en résulte est une lecture
matérielle de ces conditions à priori. La pièce centrale, une
sculpture de 9 m de hauteur, se développe à partir des feuilles de
cuivre du dôme de l'Anzeiger que l'artiste récupéra avec ses
blessures causées par les bombardements ou par les vicissitudes de
la météo ou du temps qui passe. Ces feuilles, par leur disposition,
sont aussi la métaphore de celles qui sortirent des rotatives du
journal. La sculpture est enserrée dans un vide vertical et se
déploie en s'ouvrant dans l'espace comme une enveloppe qui
détiendrait un récit que l'artiste nous laisse pourtant imaginer.
C'est là toute la subtilité de son travail : Ne montrer que
les traces et la matière de son exécution, sculpter un signifiant
pour laisser en jachères le signifié qu'il nous appartient de
construire.
Autour de cette sculpture,
« Rauschen » (Ressac), s'organisent toute une série
d'interventions comme autant de reflets d'une vie sociale passée,
d'une activité économique d'où toujours surgissent les empreintes
du vivant. Usant de tous les matériaux, de tous les points de
l'espace - sol, plafond ou saillie d'un mur – jouant avec
discrétion de l’illusionnisme et confrontant l'immensité d'une
sculpture avec des brides de sens constitués par exemple d'un gisant
et de feuilles de céramique évoquant celle d'un journal, l'artiste
permet au temps de refaire surface. Avec ses vides, ses rides et ses
pliures, le temps se donne ici comme un récit ouvert, un espace à
vivre.
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