vendredi 14 juin 2019

"Libérer la couleur", Claude Viallat à la Venet Foundation



Ce supplément d'âme qui auréole une œuvre tient souvent au lieu qui l'accueille. La Fondation Venet au Muy dans le Var se déploie dans la perfection des cinq hectares d'un parc lumineux traversé par les courbes fraîches de l'Argens, son moulin où réside l'artiste, les bâtiments industriels pour des œuvres toujours renouvelées de Bernar Venet et une galerie contemporaine pour l'exposition temporaire estivale.
La nature se vit ici comme la création d'un artiste qui a su en extraire les lignes et les couleurs en écho à son propre travail sur la matière, l'acier, la rouille et le gigantisme associé à cette tension vers l'absolue pureté du minimalisme. A l'instar d'un jardin japonais, chaque arbre, chaque sculpture s'élève alors dans la majesté d'un signe. La chapelle créée par Franck Stella en 2014 pour l'inauguration de la Fondation répond harmonieusement par ses courbes aux angles et aux lignes droites de la Galerie qui, cet été, rend hommage à l’œuvre de Claude Viallat.
 Ce dépouillement visuel, ces seuls repères chromatiques du blanc et du noir comme réponses à l'immensité verte de la nature permettent aux œuvres d'exprimer toute leur intensité. On y trouve la plus importante collection d'art conceptuel et minimal avec de vastes installations de James Turell dont l'une ouvre un oculus éliptique sur le ciel pour un hymne vibrant à la lumière. Les œuvres de Donald Judd, Dan Flavin ou de Sol LeWitt, cette année si présentes à Art Basel, parsèment la propriété où l'on croisera celles d'Arman, de Robert Morris, de Tony Cragg et de tant d'autres parmi les « lignes indéterminées » des sculptures de Bernar Venet.
Cet été, la couleur est célébrée à travers l’œuvre de Claude Viallat. L'exposition présente une vingtaine de peintures réalisées sur des bâches militaires à partir de 1980 jusqu'à ces dernières années. Des pièces monumentales où l'artiste décline sa propre grammaire dans son regard sur l'équilibre et la qualité de la matière, l'apparition d'une forme arbitraire qui absorbe tout à la fois la couleur et en délimite les contrastes comme pour une lecture radicale des fenêtres et découpes de Matisse. La couleur triomphe et, de sa seule puissance, un espace matériel s'organise à travers des coutures, des plis et des cordages. Les œuvres se dressent comme pour déchirer l'espace et en extraire l'essence. Elles se proclament dans leur stricte évidence comme si elles apportaient à ce lieu la magie de la couleur pour répondre à la perfection d'un espace, d'une architecture et d'une nature sereine où l'art pourrait éclore en toute liberté.

Exposition jusqu'au 13 septembre 2019






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