lundi 4 février 2019

Geoffrey Hendriks, "Skies" et Berty Skuber, "Reuzen"

Galerie Eva Vautier, Nice jusqu'au 23 mars 2019





Mythes et réalité ici se confondent dans une atmosphère née de cette spontanéité de l'instant présent qui fut si déterminante pour Fluxus.
Et comment ne pas penser aussi à cette incantation sourde de Baudelaire quand on se mesure à la présence des œuvres de Geoffrey Hendricks décédé en 2018? « J'aime les nuages... Les nuages qui passent.... là-bas... là-bas... Les merveilleux nuages ». Si ce poème de  Baudelaire s'intitule « L'étranger », il y a sans doute chez l'artiste cette même relation à l'étrangeté du monde quand il s'empare des cieux et des nuages comme un au-delà inaccessible, sans autre consistance que cette présence fugace et toujours changeante des formes et des couleurs. Si la représentation du ciel demeure une thématique forte de l'histoire de l'art, des cieux mystiques de la Renaissance jusqu'aux études de nuages aquarellées de Bonington, Geoffrey Hendricks se livre pourtant à une approche radicalement autre.
S'inscrivant dans le mouvement Fluxus dès sa fondation avec Maciunas en 1962, il intègre la force de l'éphémère et de l'expérimental dans de nombreuses performances qui, à l'instar de Beuys, relèvent d'une forme de cérémonial en prise avec la terre, les éléments et les mythes. Répétitions, séries, comme dans un rituel où l'artiste célèbre l'union de l'art et de la vie. Les nuages... les nuages... Ils se définissent ici comme une série de variations lumineuses, presque musicales. Mais aussi par cette élévation poétique, dans la relation au corps, quand il alla jusqu'à se représenter lui-même couvert de ces nuages-là ou bien qu'il effectua plusieurs performances où il expérimenta le déséquilibre en exécutant des poiriers. Tête renversée comme pour une autre façon de percevoir le monde.
Photographies, installations et aquarelles témoignent de la vitalité de cette œuvre qui influença tant d'autres artistes puisque Geoffrey Hendricks enseigna durant 48 ans à la Rudgers University dans le New Jersey tout en créant des actions partout dans le monde. L'artiste nous lègue une œuvre dans laquelle la poésie de l'absurde renvoie à une aspiration quasi mystique où la densité du corps se heurte à l'immatériel. Théâtre de l'humain autant que célébration solennelle teintée d'ironie, voici une œuvre singulière et multiforme.
Dans le sillage de Fluxus, l'artiste italienne née en 1941, Berty Skuber, présente une œuvre où la vie, dans sa globalité, se conçoit comme un patchwork de réalité et d'imaginaire. Entre documentation et fiction personnelle, une trajectoire se construit au travers de l’ambiguïté des mots et des images. Photographies,dessins, peintures et autres objets s'imbriquent dans une fantasmagorie encyclopédique. Le détail rebondit sur la totalité de façon aléatoire, la représentation s'efface dans une abstraction pour une grammaire qui s'ouvre à une autre forme possible de la subjectivité de l'artiste pour une nouvelle conception du monde extérieur.



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