lundi 3 juillet 2017

Daniel Dezeuze // Claude Viallat

Galerie Catherine Issert, Saint-Paul

Du 20 juin au 15 juillet 2017



Quand se désagrège en 1971 le mouvement Supports-Surfaces, certains de ses acteurs redécouvrent l'espace illusionniste de la toile et le recours à l'histoire de la peinture. D'autres persistent pourtant dans cette relation à la pauvreté des matériaux, au décloisonnement de la peinture et à sa relation conflictuelle à l'espace dans laquelle elle s'inscrit.

D'emblée, Dezeuze s'intéresse au châssis, à ses effets de transparence quand Viallat, de son côté, développe son travail sur la forme à partir de son fameux signe récurrent -haricot, osselet, écho aléatoire d'une maille de cordage, on ne le saura pas. Mais ce signe, devenu l'objet même de sa peinture, inscrit un effet de recouvrement qui dévoile la matérialité du support.
Même s'il s'agit là de généralisations trop hâtives pour deux artistes qui n'ont cessé d'explorer des chemins de traverse où ils pourraient se rencontrer, il faut bien admettre que ce face à face s'avérait extrêmement risqué. Or, miracle, plus qu'un dialogue entre les œuvres présentées, une relation harmonieuse s'instaure entre les claies, les treillis, les nasses colorées dans leur légèreté aérienne de l'un et, pour l'autre, l'intensité d'une  couleur franche, épaisse, qui se répand dans la diversité des matériaux.

Dezeuze, c'est l'empreinte de la légèreté et d'une peinture qui semble sourdre du bois comme une sève à peine colorée. Baveuse, imprécise, la couleur investit le support. Elle se répand, fragile, balbutiante, sur le tamis d'une moustiquaire, un grillage, un treillis et devient cette énigme d'une poésie du vivant qui se dépose contre un mur. Il y a là comme un dépôt biologique dans les restes d'un geste primal, l'humilité des objets dans le souvenir des rituels anciens de la cueillette et de la pêche... La nature dans sa pauvreté exulte et l'artiste se saisit magiquement de ce tremblement.
A l'inverse, Viallat impose la force de la couleur, l'insistance de la forme. Mais là encore, le fond demeure investi de son ancienne  valeur d'usage, celle d'un papier peint, de la toile d'un parasol ou de tout autre objet détourné de sa fonction par le signe de la peinture. Celle-ci peut être épaisse ou légère, transparente ou opaque, mate ou brillante, l'artiste sait en exploiter toutes ses potentialités en accord avec ou contre le support choisi.

Entre ces deux artistes circulent des vagues de formes et de couleurs contraires et complémentaires. Les unes se tissent aux autres et répandent cette poésie sereine des gestes éternels de l'artisan quand celui-ci, méticuleusement, minutieusement, dépose du sens dans l'objet qu'il fabrique. Considérons l'art comme ce face à face du réel avec lui-même, comme cet instant fragile entre l'homme et le souffle de la nature qu'il matérialise.






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