Espace de l'Art Concret, Mouans-Sartoux
Jusqu'au 9 avril 2023
Au-delà des institutions culturelles, des galeries ou des ateliers, l'art se développe aussi de façon plus subtile dans la vie de chacun par l'empreinte qu'il dépose sur notre quotidien. Le Bauhaus fut cet instant où la rigueur des formes alliée à des aplats de couleur pure allait bouleverser notre conception de l'art en l'intégrant à tous nos gestes et à l'ensemble de notre environnement. L'esthétique industrielle, la mode, le mobilier, la publicité, l'architecture s'imprégnèrent alors de courbes et de lignes épurées en relation directe avec notre vécu, notre confort et à toute fonction utilitaire par la seule force d'un langage universel.
C'est avec cet ancrage dans le réel que Jean Widmer, né en Suisse en 1929 où il étudia à L’École d'Art Appliqué de Zurich sous la direction de Johannes Itten, s'attacha à construire un ensemble fonctionnel qui, par sa rigueur mais aussi par la volonté d'une compréhension immédiate pour tous, résonne en chacun de nous au-delà de toute hiérarchie culturelle. Le graphisme et la relation instinctive entre la lettre et la chose comme elle exista dans l’Égypte ancienne, sont au cœur de ce projet et les pictogrammes, les logos ou les affiches qu'il conçut témoignent de cette volonté de dire le monde dans un vocabulaire commun.
L'exposition de l'E.A.C permet de découvrir toutes les facettes d'une œuvre qui dans sa cohérence esthétique en lien avec la typographie, aborde des sujets très divers. On y découvre des séries d'affiches réalisées dans leur relation stricte aux correspondances entre l'image et le texte grâce à la rigueur mathématique. La police de caractère du mot ainsi que le noir du texte agissent en fonction de la couleur et de son efficacité par son immersion dans la géométrie. Il y a aussi tous ces logos comme signes d'un lieu ou d'une fonctionnalité comme ce célèbre logo que Jean Widmer dessina pour le Centre Pompidou mais aussi pour d'autres établissements prestigieux. De façon plus ludique, il fut à l'origine de tous ces pictogrammes qui jalonnent nos autoroutes, toujours dans cette volonté de synthèse brute entre la réalité d'un paysage, d'un monument ou d'un animal en l'imprimant dans une forme qui s’inscrive comme un mot et que sa signification se perçoive en amont de toute conscience.
Au-delà de sa seule fonction utilitaire, quelques peintures et sculptures réalisées dans les années 90 témoignent de cette parfaite harmonie dans la découpe des formes et l'intensité de la couleur. Voici un art qui ne se soumet qu'à l'injonction d'une intelligence contrôlée.