Espace Lympia, Nice
Jusqu’au 26 février 2023
En collaboration avec le Musée Cantini de Marseille où l’exposition sera présentée plus tard, l’Espace Lympia propose une rétrospective de l’œuvre de Louis Pons, artiste prolifique né en 1927 et qui, en marge du surréalisme et de l’art brut, échappe à toute définition. Celui qui déclara dessiner «pour tuer le temps» se livra à une multitude de petits métiers en même temps qu’à des caricatures dans la presse humoristique. D’une liberté absolue, il restera jusqu’à sa mort en 2021 un artiste singulier, braconnier de l’image, traquant en elle tout ce qui en déborde, dévoilant sa puissance à absorber le réel tout en lui faisant rendre gorge. L’œuvre se dérobe à toute séduction, elle fouille les entrailles du monde pour en exhumer sa part de vérité dans le seul chaos du réel et de l’imaginaire.
Avant de s’installer à Paris en 1973, Louis Pons arpente les villages de la Côte d’Azur et de sa Provence natale. Il marche, dessine, c’est à dire qu’il cisaille à coups de traits les lignes d’un paysage de plaies et de bosses. Dans le Var, il vit plusieurs années à Sillans-la-Cascade. Là, à coups de serpe et de faux, par la grâce de l’encre de Chine, il hache les herbes folles d’un cadre champêtre pour tisser les lignes d’une vie rurale saisie entre des chaos rocheux et l’eau qui s’en empare. Sans cesse il dessine et il écrit: «Comment dessiner un œuf? Premièrement, dessiner un coq. Deuxièmement dessiner une poule. S’armer de patience et attendre.»
Dessiner c’est alors ramasser des brides de réel dans un monde cabossé. Aussi, atteint de troubles visuels, Louis Pons se consacrera-t-il bientôt à des assemblages et des tableaux en relief avec du rebut, des débris de machines agricoles, des ossements d’animaux, du bois ou de la corde. De ce bric-à-brac, il compose la carte d’un univers personnel fait de monstres et de sourires, de blessures et de caresses. Louis Pons nous entraîne dans ses chemins creux où la lumière se dispute à l’humus pour faire jaillir des visions fulgurantes sur ce que nous nous sommes et sur nos rêves. Tour à tour tendre et morbide, l’œuvre déroute et fascine tant par les matières que l’artiste expérimente que par ses incursions entre ethnologie et entomologie. Humains et insectes se fondent dans le règne végétal et minéral. Là où tout n’est plus que dessin, sculpture ou bas relief. Là où le monde se refuse à nous, là où il demeure invisible, l’artiste ne cesse de le pourchasser et de proclamer: «J’aurai la peau des choses».
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