mercredi 3 novembre 2021

Laurent Le Deunff, "My Prehistoric Past"

 



MRAC Occitanie, Sérignan

Jusqu’au 20 mars 2022



Être libre c’est ne pas être de son temps, de n’appartenir à aucun espace autre que celui qui se façonne dans les méandres de l’art. Laurent Le Deunff en parcourt les lignes de fuite, explore les circonvolutions du réel et de l’imaginaire quand l’espace se fissure et que le temps se dérobe à toute linéarité. «My Prehistoric Past» - décalage de la langue et dérision autobiographique - est ce récit tendu sur un fond primitif de figures polymorphes, dans un bestiaire réduit à un silence totémique et dans une nature caverneuse à souhait.

Le monde est nu dans la seule exhibition de son étrangeté. Rocailles, traces, fragments, tout n’est que l’écho d’un souffle que l’artiste manipule, sculpte, dessine, toujours dans les facéties du pas de travers et de l’enfance de l’art. Laurent Le Deunff brouille les pistes ; il emprunte les ressources de l’art populaire et de ses mythologies pour laisser en jachère les paysages qu’il compose dans la seule béance de leur incertitude. Vers ou coquillages, tirages pigmentaires de champignons aquatiques, colliers de dents en papier mâché, albâtre, sapin tilleul et chêne… Toute une archéologie de la nature s’éveille dans l’éclosion du faux, de l’illusion et de l’illusoire.

Tout n’est que décor, anachronisme, artefact. Il n’y a pas pas de création ex nihilo, ni dans la vie ni dans l’art. Le vrai et le faux renvoient alors des perceptions hasardeuses, des lambeaux de récits qui s’accrochent et se déchirent dans une mise en scène particulièrement soignée. L’inventivité des matériaux, l’hétérogénéité de l’espace dans la fusion du minéral, du végétal et de l’animal tout renvoie à une monumentalité organique, inquiétante. Mais par des jeux contraires, comme par sa série de petits dessins très précis à la mine de plomb avec toujours un chat qui revient au centre d’une narration burlesque, Laurent Le Deunff parvient toujours à redresser l’art fragile du déséquilibre. A la fois lieu d’investigation et scène primitive, l’installation de l’œuvre est en elle-même un clin d’œil au regard trop cadré qu’on accorde au monde, à la nature et à soi-même. Tout n’est que mouvement, déformation, recomposition, et toujours l'espace et le temps réunis dans les mêmes contractions du réel et de l’imaginaire.









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