samedi 5 juin 2021

« Un toit pour le silence », Un projet de Hala Warde

 


Pavillon libanais de la 17e Biennale d'Architecture, Venise




                       Le long des Zattere déserts, on découvre un lieu blotti dans les Magazzini del Sale, un lieu sculpté dans l'ombre et la lumière, une architecture où résonne l'histoire du Liban depuis ses oliviers millénaires jusqu'à ses dernières blessures dans l'empreinte d'une déflagration qui dévasta le cœur de Beyrouth le 4 août 2020.

Ici ni murs, ni portes ni fenêtres mais plutôt un lieu protecteur, ouvert au recueillement, un nid de douceur, un toit pour le silence. L'architecte Hala Wardé l'a conçu comme une partition musicale où se mêleraient architecture, poésie, peinture et images photographiques ou filmiques pour répondre aux questions qu'il formule ainsi : « Pourquoi ne pas penser les lieux par rapport à leur potentiel de vide plutôt que de plein ? Comment lutter contre la peur du vide en architecture ? Comment imaginer des formes qui génèrent des lieux de silence et de recueillement ? »

Pour un toit, il faut ici surtout penser à un ciel ou aux feuillages d'oliviers millénaires pour dire la permanence du temps et répondre au thème de cette Biennale : « Comment vivrons-nous ensemble ? » Car vivre c'est penser cette altérité de soi au monde, se mesurer au plein et au vide et ce projet nous entraîne dans un parcours magique parmi des oliviers, piliers du temps, photographiés dans la lumière du jour par Fouad Elkoury puis filmés par Alain Fleischer dans le sommeil de la nuit. On y trouve les « antiformes » que créa l'urbaniste-philosophe Paul Virilio ou bien les « Métamorphoses », cette traînée de verre qui serpente lumineusement sur un sol nocturne, verres brisés de l'explosion du port de Beyrouth, vallée de larmes ou douceur d'une eau apaisante. Au centre de cet espace, l’œuvre d'Etel Adnan apparaît telle une découpe de lumière pour irriguer le réseau poétique d'un « toit de silence ». Voici un miracle d'humilité et de recueillement dans un lieu qui nous parle autant qu'il se contemple. Mais ici les paroles sont silencieuses. Elles restituent le froissement des feuillages, le murmure du temps, le frémissement des cœurs. Exposition nomade, le projet sera présenté ultérieurement à l'Abbaye de Jumièges et au Palais de Tokyo à Paris.




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