Eric Bourret
Hôtel Départemental des Expositions du Var, Draguignan
Jusqu'au 22 août 2021
Un nouveau lieu au cœur de la ville, une réussite architecturale et un écrin lumineux pour une exposition inaugurale qui entraîne le visiteur dans une Méditerranée de légendes avec la figure du héros, Ulysse. Le fil du récit se développe sur plusieurs étages, dans des salles finement colorées comme autant d'îles sur lesquelles le héros échoue et se heurte à la furie des Dieux et des hommes ou à la folie dévorante des Sirènes ou de Circée.
Tout s'organise autour de dix épisodes majeurs de l'Odyssée homérique à partir de la figure du Cyclope jusqu'à la scène finale du retour à Ithaque. Si le parcours témoigne d'une volonté de raconter et d’illustrer les aventures d'Ulysse, il se développe surtout comme un périple dans le temps et sur l'espace mouvant de la Méditerranée. Une épopée faite de miracles et d’embûches pour un mythe qui défie le temps et revient à nous sous la forme de toutes ces traces et témoignages homériques qui se sont égrainés de la Grèce antique jusqu'aux productions de notre imaginaire contemporain.
C'est ainsi que le visiteur voguera de Charybde en Scylla, parmi des objets archéologiques, des peintures anciennes, des tableaux naïfs de Bauchant ou des œuvres contemporaines pour actualiser cette lecture de l'Odyssée. Et cet ensemble d’œuvres, empruntées parfois à des collections prestigieuses et rassemblées dans une scénographie particulièrement soignée, parvient à tisser la trame d'une épopée qui traverse le temps et dont chaque fil renvoie aux énigmes de notre présent, à nos terreurs ou à nos rêves. Histoires d'exil, de naufrages, de meurtres et de salut. Des fragments de sarcophages, des cratères anciens, des céramiques d'Urbino, des tableaux de Jordaens, de Gustave Moreau, de Füssli, Mossa ou de Félicien Rops côtoient des créations contemporaines avec un ensemble photographique d'Eric Bourret, une superbe vidéo d'Ange Leccia ou une composition de Tadashi Kamawata pour dire poétiquement le naufrage, l'archipel des débris dans l’éternité de la mer. C'est sur cette note contemporaine que le voyage s'achève avec une scène qui consacre tout le final tragique d'or et de sang de l'épopée, cette installation sublime d'Anne et Patrick Poirier : une voile tendue et la couleur du sang séché. Tout autour, des flèches dorées, le fil qui relie la voile du voyage à la tapisserie d'une mer éblouie, des rames et une barque d'or dans la force éclatante du soleil, le massacre final, la folie des hommes mais aussi la beauté du monde.
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