mercredi 19 juin 2019

Rebecca Horn, "Fantasmagories corporelles"


Loin de Nice...

Museum Tinguely, Bâle


Née en Allemagne en 1940, Rébecca Horn avait cette intuition que sa langue natale ne pouvait plus alors parler le monde et qu'il fallait lui substituer un langage plus ouvert, plus universel : l'art. Elle s'exprimera donc par le corps dans une série d'installations et de performances qui s’échelonneront dans le prisme de la relation au manque, à la souffrance ou à l'évasion. La force de ses interventions réside dans le silence émotionnel qu'elle s’octroie, laissant l’œuvre se déployer dans toute son ambiguïté quand elle coïncide tour à tour avec la douceur ou la violence, l'harmonie et le chaos, le corps et la machine.
L'exposition de Bâle « Fantasmes corporels » met l'accent sur l'aspect du corps réduit à une machine s'exprimant notamment par une série de prothèses qui répondent à l'esprit du Musée Tinguely où elles sont présentées. Elle est le pendant d'une autre exposition au Centre Pompidou de Metz, « Le théâtre des métamorphoses » qui met d'avantage l'accent sur la pratique cinématographique de l'artiste. A Bâle, l’œuvre de Rébecca Horn évolue dans les méandres de sa complexité tant elle joue des paradoxes qui la constituent. La légèreté des plumes et des ailes se heurte à la sécheresse des' prothèses mécaniques. L'humain se greffe à l'animalité et à la machine. Tous les scénarios s'écrivent ici à l'ombre des rêves, des cauchemars, des contes de fées ou des mythologies. Tout l'art de Rébecca Horn réside dans cette indifférenciation, dans ces créatures hybrides, dans la multiplicité des pratiques et des matières, images, sculptures, photographies ou films. La poésie est grinçante et l'humour léger. Une beauté maladive transpire de cette univers contaminé par une immense solitude.
Tour à tour dépouillées ou lyriques, les pièces présentées, au-delà de leur aspect obsédant, déploient un champ de créativité très personnel. La richesse de l'expérimentation permet à l'imaginaire de se revêtir des formes les plus inédites. Les œuvres, dans le sillage du surréalisme et du dadaïsme, oscillent entre la tension d'un conte cruel et la légèreté d'un cérémonial initiatique. Les ailes sont omniprésentes. Métaphores d'un envol ou d'une chute, l'artiste les pare de cette incertitude pour une œuvre où chacun se confrontera au miroir d'une part de lui-même.

Jusqu'au 22 septembre 2019




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