Villa Arson, Nice, du 4 juin au 17 septembre 201
14 artistes du Bénin.
Richard Korblah, Des ponts, pas des murs, 2015
Lorsque l'Afrique se représente, ce n'est plus seulement l'image qu'elle se donne qui importe mais aussi celle qu'elle renvoie de notre monde occidental. Aussi dans cette exposition, sommes-nous loin de tout exotisme et c'est, en partie, dans ce jeu des différences que réside l'intérêt de ces œuvres. Intrusion et exil se heurtent ici. Les racines du continent noir éclairent notre propre histoire d'une lumière sombre et lui confèrent ce rapport aux éléments primitifs, à l'eau, à une terre ingrate, qui se sont égarés dans les méandres de notre mémoire. Aussi ce retour à l'Afrique est-il bien un retour à nous-même et à notre art quand les artistes du Bénin nous renvoient le reflet de nos peurs, d'un passé dont nous ne savons plus que faire, d'un avenir plombé par l'angoisse écologique et d'une société amputée de l'univers magique et de la spiritualité pour les jardins des délices de la consommation.
Si les artistes béninois nous révèlent
ainsi à nous-même, il serait ingrat de ne pas souligner la qualité
intrinsèque des œuvres présentées. Très diverses dans leurs
formes comme dans leur contenu, toutes témoignent du choc entre le
passé et le présent de l'Afrique. Les pratiques artisanales
répondent aux drames d'un continent confronté aux problèmes de
l'eau, à l'émigration et au post-colonialisme. Peintures,
assemblages, sculptures créent un subtil réseau tissé de naïveté
feinte quand la tradition interroge la modernité et que chaque œuvre
se démarque de l'autre entre humour et désespoir, que la vie et la
mort s’entrecroisent dans le même rire et, qu'au fond de ce
cheminement artistique, une force vitale insoupçonnée apparaît.
Nous comprenons alors que cette Afrique n'est pas un passé mais
plutôt l'écho de notre futur.
La pauvreté des matériaux, l'aspect
bricolé, le recours à la récupération sont autant de pièges pour
ceux qui ne verraient ici que leurs propres clichés de l'Afrique
quand, en réalité, ils désignent des pratiques artistiques où le
réel, le quotidien se conjuguent avec modestie à l'universel et à
l'éternité. Ces artistes, de stature internationale, écrivent leur
monde dans une langue que nous savons lire car elle répond à bien
des égards aux questionnements de notre art contemporain. Nous y
lirons nos colères, nos espoirs et les fragments d'une poésie à
naître.
14 artistes à voir : Edwige
Aplogan, Aston, Daavo,Bejamin Déguénon, Kifouli Dossou, Euloge
Glélé, Korblah, Charles Placide, Psycoffi,Gérard Quenum, Prince
Toffa, Julien Vignikin, Didier Viodé, Dominique Zinkpé
Julien Vignikien, La dîner des fantômes, 2012
Psykoffi, Une porte, 2012
Julien Vignikien, La dîner des fantômes, 2012
Psykoffi, Une porte, 2012
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