Sur un étagement de restanques en surplomb de la Méditerranée, le site Cap Moderne se déploie dans l'un des lieux les plus saisissants de la Côte d'Azur. Quand Eileen Gray le découvre en 1926, elle entreprend avec son ami architecte Jean Badovici la construction de la Villa E-1027, un fleuron de l'architecture moderne. En parfaite osmose avec son environnement, l'édifice joue de l'horizontalité maritime et de la verticalité des contreforts qui l'accueillent. Mais surtout, il résonne par ses courbes, ses garde-corps et ses stores en toiles de bâche, avec l'univers nautique tel un paquebot hissant sa blancheur sur les vagues méditerranéenne. Il s'agissait alors de répondre aux exigences d'un lieu de villégiature, tout à la fois voué à la convivialité et à la solitude. Une fois la construction achevée en 1929, Eileen Gray, designer, dut adapter le mobilier à la surface relativement modeste de la villa. C'est ainsi qu'elle dessina toute une série de dispositifs pour le confort de ses usagers sans jamais contrecarrer l'exigence fonctionnelle. Elle inventa donc des solutions originales avec des meubles intégrés ou mobiles toujours à la recherche de nouvelles solutions esthétiques à partir des matériaux les plus inédits. Tout devait rester sobre et s'adapter à l'architecture du lieu. Pourtant à la fin du XXe siècle tout avait disparu et il fallut de longues recherches minutieuses pour restaurer le lieu à l'identique et retrouver ou reproduire chaque objet dans son exactitude.
En 1932, le couple se fissura et Jean Badovici occupa les lieux. Tandis qu'Eileen Gray s'opposait à tout élément décoratif en contrepoint de l'architecture, Jean Badovici accepta que l'un de ses visiteurs réguliers, Le Corbusier, réalisât sept peintures murales encore visibles dans l'intérieur de la villa. En 1948, Thomas Rebutato acheta un site voisin pour y faire construire un petit restaurant « L'étoile de mer » qui devint la cantine du Corbusier, lequel dessina un cabanon qui fut construit en annexe et qu'il occupa jusqu'en 1952. Entre 1951 et 1957, Le Corbusier réalisa à quelques mètres de là, sur pilotis, quelques Unités de camping qui furent exploités jusqu'en 1970 par la famille Rebutato.
L'ensemble du site « Cap Moderne », vient d'achever sa restauration et est désormais géré par le Centre des monuments nationaux.