lundi 20 octobre 2025

Mickael Kenna, « Constellation »

 


Musée de la Photographie Charles Nègre, Nice

Jusqu’au 25 janvier 2026



Inscrire l’attente et le trouble d’une révélation impose humilité, silence et retrait. C’est dans cette retenue quasi mystique que le photographe britannique, depuis 50 ans, explore les chemins de l’invisible. Sur de petits formats, dans l’exigence d’un noir et blanc lumineux et d’une méditation sur l’essence même du monde et de son image, Mickael Kenna, avec obstination, à travers la pratique de la chambre noire puis par la qualité du tirage, nous confronte à l’énigme de la beauté.

Dans cette rétrospective riche de 124 clichés argentiques, ce grand voyageur, dans un vocabulaire minimaliste, s’attache à explorer l’âme d’une architecture ou d’un paysage. Celui qui, enfant, étudia dans un petit séminaire, aujourd’hui encore, ici ou ailleurs, en Asie ou dans les brumes d’un autre continent, poursuit sa quête d’un mystère que la photographie dévoile, plis après plis, dans la seule exigence de la lumière. Poète ou philosophe, ce n’est pas le visible qu’il traque face à la monumentalité d’un palais ou dans la fragilité des lignes d’un arbre ou le flou de son feuillage mais le souffle qui les traverse. Expérience du vide et du temps. Empreinte de la mémoire. Mouvement et disparition. Autant d’approches méditatives qui s’impriment modestement pour une paisible célébration de la vie.

Pourtant rien de mièvre dans cette passionnante aventure esthétique quand Mickael Kenna s’est aussi attaché à photographier les camps de concentration et qu’il a publié une centaine de monographies dont certaines sont exposées ici. Entre brume et éclaircies, les pages de la beauté s’ouvrent ou se déchirent. Tel est le monde, semble-t-il nous dire. Cette confidence, elle se murmure sereinement dans un espace dépouillé, dans la seule frontalité d’une forme, d’une ligne et de sa densité comme dans un écho de ce que la nature porte en elle de grandeur, de sérénité et d’éternité.

Virtuose de la sensibilité, Mickael Kenna interprète les gammes du silence comme autant d’instants pour nous conduire à une révélation. Chaque image semble en suspension, au seuil d’un miracle. La photographie lacère alors le réel, développe nuits ou éclairs dans l’incertitude du ciel et du geste des hommes. Ce sont toutes ces traces, ces empreintes déposées au hasard de l’existence que l’artiste voyageur prélève au fil du temps. Il faut se laisser alors emporter dans cette «constellation» où chaque étoile est un tremblement d’image, un feu d’artifice éteint dans le noir et le blanc.

Nice, Venise, Chine ou Japon, Mickael Kenna nous transporte dans ces territoires toujours inexplorés de la beauté quand celle-ci ne se donne que dans l’expérience de sa recherche. Il nous en délivre ici quelques parcelles, comme pour une offrande, avec humilité. L’émotion est toujours à ce prix.



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