lundi 18 novembre 2024

«Passion Renaissance», Légendes d’artistes au XIXe siècle

 


Musée des Beaux-Arts, Draguignan

Jusqu’au 23 mars 2025



Comme en un jeu de miroir, l’artiste souvent se mesure à l’aune de ses prédécesseurs. Il s’y confronte parfois pour en parfaire les leçons, souvent aussi pour se contempler à travers l’aura d’un mythe comme ce fut le cas de bien des peintres du XIXe siècle lorsqu’ils rendirent hommage aux grands maîtres de la Renaissance. Ce sont ces «Légendes d’artistes» que nous raconte le Musée des Beaux-Arts de Draguignan et qui, au-delà d’un seul point de vue anecdotique, nous propose une réflexion sur la relation formelle qui se joue d’un artiste à l’autre et sur la mise en abyme d’un tableau par la rencontre d’un artiste avec ses prédécesseurs.

Il exista au début du XIXe siècle, cette «veine troubadour» qui, dans le sillage du Romantisme, répandit une vision idéalisée du passé en littérature comme en peinture. L’Histoire est alors revisitée sous le filtre de l’héroïsme et, dans les arts, sur celui du mythe du génie créateur, comme il le sera plus tard sous le signe de celui de l’artiste maudit. Entre imaginaire et réalité, un récit se construit donc et, en vingt-sept œuvres provenant de musées français et italiens, l’exposition explore ces instants de fascination et nous permet de saisir comment ceux-ci peuvent paradoxalement aveugler le regard des artistes et susciter en eux le désir de les dépasser par la seule puissance narrative.

Se confronter à Giotto, à Léonard, à Raphaël ou à Michel-Ange témoigne d’une aventure quelque peu déroutante quand on l’aborde dans un style académique. Pourtant qu’il s’agisse de peintres reconnus tels Fragonard, Ingres ou Granet ou d’autres plus confidentiels, leur lecture du passé nous permet de considérer que l’Histoire n’est toujours qu’une réécriture qui se réalise à partir du présent. Et l’art nous permet d’anticiper ce présent.

D’un tableau à l’autre, il faut alors saisir l’aventure des regards, la direction qu’ils empruntent quand ils se rencontrent ou qu’ils capturent tel ou tel détail d’une œuvre passée. Ainsi Cesare Maccari repeint-il la Joconde en train d’être exécutée par Léonard. Ou bien c’est la fascination du modèle qui l’emporte chez d’autres artistes, comme la Fornarina pour Raphaël et toujours, dans une vision académique, le trouble des sentiments perçus au travers de mises en scène très étudiées au terme d’une véritable théâtralisation.

Ce parcours insolite entre la Renaissance et le XIXe siècle qui concerne aussi bien l’histoire de l’art que l’histoire politique est aussi un jeu de piste dans lequel il faudrait démêler les fils de la légende et les traces du réel. Les œuvres présentées nous fournissent des bribes de réponses tout en demeurant des énigmes. Mais les plus belles œuvres ne sont-elles pas celles qui recèlent cette puissance du mystère?

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