Galerie Contemporaine MAMAC, Nice
Jusqu'au 12 février 2022
Quand les animaux se construisent leurs nids ou leurs tanières, l'espèce humaine se pense une architecture. C'est par celle-ci, dans son contexte «moderniste» du début du XXe siècle que l'artiste berlinoise Isa Melsheimer, par une œuvre hybride, élabore les métamorphoses de l'espace et du temps. A travers l'image fixe d'un stéréotype, celui de la Côte d Azur saisie dans le regard du touriste, l'artiste décline les mutations par lesquelles le réel se heurte aux clichés qui le définissent. Le monde n'est que transformation et sa représentation engage la relation de l'homme et de la nature Mais surtout celle-ci nous modifie jusqu'à relier les traces de la présence de ses origines larvaires avec l'univers onirique des «Aliens» et de la science- fiction.
Par un rêve éveillé ou une méditation sur les cycles de la vie, Isa Melsheimer se saisit de toutes les techniques pour construire le récit d'un monde parallèle issu de l'écosystème, de l'imaginaire et du langage de l'art. Des gouaches illustrent alors des rideaux dont la fluidité se heurtent aux murs. Des architectures novatrices, celles de Anti Lovag ou de Guy Rottier, se transforment en constructions de céramique avec des excroissances végétales, des formes de chrysalide ou des rappels de stéréotypes – salade niçoise et autres symboles de la Riviera. La broderie intervient dans la précision d'un temps long pour réparer ce qui est déchiré.
L'art est aussi un environnement inclus dans la circulation du vivant. Isa Melsheimer créée des caissons à l'image des caisses de Ward qui servaient à ramener en Europe des plantes exotiques. Dans un système clos de verre, de lumière, d'humidité et de terre, une nature artificielle se génère et poursuit son aventure autonome. Celle-ci se développe ailleurs, quand les renards par exemple s'emparent peu à peu des villes. Tour à tour prédateurs ou menacés, les hommes aussi, comme chaque espèce animale sont saisis dans les vastes mouvements de la Terre. D'ailleurs, dans ce «Compost», régénérescence et pourriture vont de pair. Tout n'est que circulation. Des paysages se composent et des ruines renaissent. Ce qui était abandonné reprend vie. Alors qu'en est-il de l'humanité? Dans cette exposition, elle n'apparaît qu'en termes d'ombres derrière un voile de gouache ou dans la trace de l'architecture. Mais qui fait partie encore du décor, l'être humain ou bien les majestueux palmiers menacés par les charançons rouges? Et ce décor, à l'image des paysages ou des édifices que les hommes construisent, est aussi ce stéréotype d'un art qui serait séparé de la vie.
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