Galerie des Ponchettes, Nice
A
trop vouloir traquer l'invisible, on finit quelquefois par débusquer
le néant. Surtout quand on prétend capturer cet invisible à
travers les objets du quotidien sans percevoir combien cet
échantillonnage là procède d'une mythologie dans la définition
précise de Barthes lorsqu'il en révélait le visage boursouflé
des Bouvard et Pécuchet dès lors qu' ils s'en emparent.
« Traquer
l'invisible » puisque la chose désignée ne serait donc que
l'enveloppe trompeuse de ce qu'elle renferme. C'est à dire qu'en
elle résiderait la magie d'un paradis écologique ou politique
perdu, un jardin d’Éden hanté de récits primordiaux avec leurs
gnomes et autres personnages de contes. Ou quand les racines rêvées
se travestissent en utopie... Cette approche essentialiste fleure
bon la nostalgie mais celle-ci exhale pourtant des remugles peu
flatteurs. Reste pourtant l'incertitude légèrement inquiétante
d'un monde à la présence trop suspecte et tout ceci serait censé
être empreint d'une belle poésie si les chemins empruntés par
l'artiste n'avaient été tellement labourés qu'ils en seraient
devenus stériles. La lourdeur poétique se charge d'une
impardonnable tristesse quand on évoque des vagues, des herbes
rares, des pierres roulées, des rideaux d'arbre -puisque telles sont
les titres des œuvres- par des formes et des concepts qui, loin de
s'ouvrir à du sens ou à de nouvelles perspectives, les enferment
dans la grisaille du déjà vu et de la facilité On les a tellement
arpentés ces chemins là, sans surprise, toujours parsemés des
mêmes petits cailloux de peur que nous nous y égarions. Et on les
parcourt de nouveau avec ennui, sans autre promesse que ce manque
d'horizon et la lassitude de lire encore ce même récit qui, d'une
page à l'autre, résonne d'un même vide.
S'il
faut rêver, alors livrons ces galets à la mer, écoutons cette onde
grondante quand l'horizon les ratisse sauvagement jusqu'à la grève.
Quand au « rideau d'arbre », selon le texte qui
l'accompagne, il « évoque l'étrange mue d'un arbre qui aurait
pris son autonomie ». Bigre... Alors déchirons-le et, à
l'instar de ce pauvre oiseau naturalisé censé célébrer l'envol,
retrouvons la vie, la vraie vie, envolons-nous !
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