lundi 16 octobre 2017

Nicolas Daubanes

                Galerie Eva Vautier, Nice

           



                              Dans l’art contemporain, il est établi que le matériau choisi par l’artiste imprègne le sens que l’œuvre diffuse. Aussi est-il, au sens strict, un signifiant qui l’irrigue et la construit  La matérialité de l’œuvre, exempte de toute neutralité, est donc en elle-même le signe d' un engagement de l’artiste. Elle renferme ce noyau d’énergie et de vérité en amont de toute représentation.

                           Or lorsque Nicolas Daubanes  évoque l’univers carcéral, il l’énonce, par exemple,  à partir de carrelages prélevés dans une prison. Mais arrachés du sol, puis exposés contre  le mur de la galerie, ils agissent par leur puissante frontalité comme un immense tableau réduit à sa seule intensité esthétique. La signification de l’œuvre n’apparaît ici que par la connotation de la matière qui contredit la forme. Un conflit s’installe entre l’apparence et la signification,  et l’artiste ne cesse de jouer sur ces confrontations de sens sur le registre du quotidien, de la fragilité, de l’effacement.  Des matériaux instables, dangereux, anodins, très éloignés du champ traditionnel de l’art,  portent cette voix.
                         Mais cette matière peut être aussi empruntée à un domaine plus symbolique quand l’artiste créée des dessins à partir de poudre de fer aimantée. L’idée de l’évasion avec les barreaux limés d’une cellule devient le préalable à la fabrication de l’œuvre construite à partir de ces résidus. Il y a derrière celle-ci une histoire abandonnée à l’imagination de celui-qui la regarde.

                   L’imagination est aussi une histoire de la liberté, toujours menacée, revendiquée, évanescente. Elle implique par détour l’expérience mentale et physique du narrateur qui s’en saisit de l’intérieur avec ses objets, ses frustrations et ses désirs. Elle ne s’incruste pas dans l’anecdotique. Cette histoire-là, quand elle parle de l’univers carcéral, elle désigne aussi la condition de tous les hommes.

Michel Gathier

Du 14 octobre au 2 décembre 2017


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