vendredi 6 novembre 2015

Patrick Lanneau

La conciergerie Gounod, Nice

                       





                 La puissance interne de la peinture l’arrache au motif, à l’imagerie plate où se blottit le plus souvent la représentation. Cet arrachement  procède ici à la fois de l’intensité  de la couleur et de la qualité de la matière quand celles-ci émergent du  geste du peintre tant au terme d’un cheminement mental que par le jeu de ses tâtonnements sensitifs et de ses errances oniriques . Surgissent alors ces  images mentales qui se développent au gré des pigments, des colles, des coulures, des séchages jusqu’au point où la peinture, glorieuse, surgit dans toute son incandescence.
                  Abstraction et figuration se dissolvent alors et le réel est saisi dans cette gangue lumineuse qui restitue  le monde à sa source, à son point originel, vierge de toute narration. La seule histoire du chaos et d’une construction.
                 Ici cette ébauche de représentation procède à la fois du paysage et du portrait mais il ne faut pas en espérer une architecture, des éléments de psychologie ou une quelconque  référence au réel. Celui-ci n’est que le seuil d’un cheminement qui conduirait à énoncer ce que la peinture doit être - non pas le réel conçu comme modèle ou comme cible mais  un passage, un filtre où les sens s’affrontent et se confrontent pour rendre compte d’une matérialité nouvelle.
                  Ainsi Patrick Lanneau crée-t-il un monde. Des paysages ou des portraits saisis à l’aube de leur existence,  un paradis perdu du peintre comme écho à cette lumière qui se façonne dans une gangue picturale pour seule prémonition du monde. 
              Ordre et désordre rodent dans le corps de cette œuvre étonnamment vivante. Les tons vibrent, les couches successives scintillent ou s’éteignent. Ce monde est en train de naître. Il se nomme la peinture. Et la lumière fut.